LA NEGOCIATION

LA NEGOCIATION

La négociation c’est de la préparation, du fond (stratégie, arguments, etc.) et de la forme (effets de manches, discours, techniques de discours et de présentation des arguments).

Préparation de la négociation

     Prévoir les différences de compétence et de culture des interlocuteurs,

     Préparer l’environnement matériel,

     Clarifier sa stratégie générale et ses objectifs[1] (jalons) chiffrés et datés.

     Fixer limites mini-maxi de chaque concession.

     Préparer et peser les termes qui permettront de rédiger les accords intermédiaires prévisibles.

     Faire à l’avance tous les calculs (opérations) prévisibles (on effectue très mal des calculs pendant une négociation).

     Préparer la préservation du secret pendant toute la négociation (la publicité tue la négociation)

     ECRIRE très proprement tous les éléments qui précèdent et le garder sous les yeux.

    

Connaître son interlocuteur : les huit grands types de caractères à reconnaître dans une négociation :

   L’exubérant               => Ne pas tenir compte de ses excès

   Le passionné           => Ne pas se laisser emporter dans les débats d’opinions

   Le nerveux                => Le sécuriser

   Le sentimental         => prompt à se blesser

   Le réaliste                 => Il ne tiendra pas compte des sentiments

   Le flegmatique         => S’appuyer sur sa modération

   L’amorphe                 => dont il  faut violer la décision

   Le nonchalant          => Qu’il faut essayer d’intéresser

Savoir communiquer pendant une négociation

   Imposez la courtoisie, refusez qu’on vous coupe la parole, ne la coupez pas.

   Refusez de vous laisser mettre en colère

   N’acceptez ni insulte ni calomnie ; au besoin rompez

   Laissez toujours une porte de sortie à l’autre.

   Attention au rlsque de malentendu ou de mal lu exacerbé par la situation de confrontation. (bannir les mots techniques, parler haut en articulant, détecter et relever immédiatement les signes non-verbaux de non-compréhension : froncement de sourcils, etc.).

Les propos

Attention au glissement de la rationalité vers l’affectivité. Face à un fournisseur agaçant, l’objectif « être livré à temps » risque de devenir « lui faire payer ses retards ». Pour cela, prendre de la hauteur par rapport à la négociation. Toujours être capable de qualifier les propos[2] entre :

Nature des proposExemples de phrasesConduite à tenir
1.         Les faits        « Vous augmentez vos prix de 7%….1.Tout ramener aux faits.
2.         Les causes « Vous faites cela pour augmenter vos profits…. »1.Tout ramener aux faits. Se méfier des raisons ou des causes supposées qui sont souvent multiples et discutables.
2.         Les opinions ….. c’est tout à fait anormal….2.Ne JAMAIS discuter des opinions. Les opinons dépendent des valeurs leur discussion dérive donc vers l’idéologie. Etre sourd aux opinions.
3.         Les sentiments…. vous me décevez beaucoup »3.Compréhension tolérante à l’égard des sentiments. On ne peut contester un sentiment ; qu’on le trouve absurde ne change rien au fait qu’il est ressenti ainsi. Faire preuve d’empathie (reformulation compréhensive).

L’origine des désaccords :

     Ce qui est : Les faits pourtant incontestables sont vus de façons différentes.

     Ce qui détermine ce qui est : Les faits et les opinions sur les raisons de ce qui est. Attention ! Les causes des faits sont encore plus propices à polémiques stériles (causes indirectes, multiples) que les faits eux-mêmes. Si possible, éviter de discuter des causes.

Trois exemples d’attitudes et la conduite à tenir :

AttitudesDescriptionConduite à tenir
La parade (sens « militaire » du terme.)Démonstration de force destinées à impressionner d’emblée l’adversaire. Elle se déroule le plus souvent en introduction. (exemples : le vendeur qui commence par déclarer solennellement que ses prix ne sont pas négociables)Ne surtout pas commencer à discuter ou à polémiquer à ce moment. Enregistrer sans agressivité ni ironie. Rester calme pour montrer que la parade est tombée à plat « il y a des choses possibles et d’autres qui ne le sont pas mais je suis ouvert à toutes les idées réalistes qui permettent de rendre possible ce qui l’est pas ».
Le vidage de sacToute déclaration du genre explosion d’agressivité improvisée et parfois sans rapport avec le sujet. On dirait après « je leur ai dit en face ce que je pensais, ça fait du bien »Ne répliquez pas (malgré l’envie irrésistible). Rompez seulement s’il y a eu insulte personnelle. Le vidage de sac est souvent positif ; il permet de faire retomber la tension et celui qui s’est laissé aller à le faire est souvent penaud et propice à lâcher des concessions pour montrer qu’il peut aussi être constructif.
Le Baroud d’honneurSorte de vidage de sac de fin de négociation. Fausse parade solennelle sur les sacrifices exigés et l’obligation de se plier à la loi du plus fort « Vous vous moquez bien que nous y perdions ! »Ne pas brusquer, ne pas répondre. Laisser s’exprimer les passions puis mettez l’accent sur ce qui a été accompli en commun et que « chacun verra plus tard l’intérêt de l’accord ».

Les moments difficiles de la négociation

Négociation n’est pas concertation et il faut accepter des affrontements.

AttaquesDescriptionConduite à tenir
La tentative de culpabilisation / procès d’intention« vous m’aviez promis cette commande ! A cause de vous je vais me faire virer ! ». « Cette réorganisation, c’est juste pour licencier des gens ! ».Ne pas se défendre mais contre attaquer avec un procès d’intention équivalent. « Vous dites n’importe quoi ! Vous ne parleriez pas autrement si vous vouliez torpiller la négociation ! Vous êtes à bout d’arguments ! »
Faire sortir de ses gondsUtiliser des mots durs, à la limite de l’insulteRester calme, n’accordez pas trop d’importance aux mots prononcés à ce moment et ne rompez qu’en cas d’insulte. Utilisez les calmes pour calmer le jeu. Attendez la fin de la crise avec plaisir, celui qui s’est énervé sans parvenir à entraîner les autres essaiera de se racheter par des concessions…
Pousser à en dire plusPousser à en faire dire plus que nécessaire.  (voir ligne suivante)N’utiliser que des mots très simples sans adjectifs inutiles pour donner moins d’aspérité à le critique.
Clouer le bec avec un argument 1) douteuxUtilisation d’un argument suspect ou invérifiable et inattendu. « De toute façon, je ne vous l’avais pas dit, mais vous êtes 50% plus cher que vos concurrents »Silence + mimique gentiment dubitative. Cela pousse l’interlocuteur à en rajouter et à se piéger lui même.
Clouer le bec avec un argument 2) réelSi ce cas se produit c’est que la négociation a peut être été mal préparée…Question-test : reformuler et faire préciser le sens de chaque mot  au cas où, entraîné par son élan, l’autre utilise d’autres termes plus discutables. Question-relais : « Et, vous qu’en pensez-vous? » si possible vers un tiers bienveillant sinon vers l’autre : « Et vous que feriez-vous à ma place ? » (question écho).
Le blocageSignes d’impatience, sentiment de tourner en rond, montée de l’affectivité.Proposer une pause.

Les concessions : Ne cédez jamais rien sans rien en échange. Donnez de la valeur à ce que vous cédez. Négocier, ce n’est pas être gentil avec l’autre. Accorder une concession sans contre partie pour faire preuve de bonne volonté est stupide et dangereux.

Quelques tactiques d’argumentation

     Soyez imprévisible. Ne dites pas ce que vous ferez ni, surtout,  ce que vous ne ferez pas.

     Gardez des arguments en réserve. S’ils ne servent pas, ce n’est pas grave si l’objectif est atteint.

     La marinade : Faites attendre l’autre pour qu’il imagine le pire.

     L’éclaireur : Envoyer, sous prétexte de détails, des éclaireurs s’enquérir des limites des intentions de l’autre et obtenir des concessions préalables détachées du reste. => Refusez de négocier avec un non-décideur (poliment, en regrettant qu’on ne lui ait pas donné le pouvoir)

     La fausse piste : Faire mine de s’acharner sur un objectif fictif puis feindre de se rabattre « à défaut » sur l’objectif qui intéresse vraiment. Exemple syndical : le PDG veut les horaires libres. Il insiste pour rétablir le pointage qui permet les horaires libres, tout focaliser sur le pointage malgré l’opposition des syndicats, puis l’abandonner au dernier moment pour permettre l’horaire variable à l’aide d’un autre système.

     Le bourreau et le sauveur :  
1) => Ne mettre qu’un seul bon sinon l’autre les fera surenchérir
2) => Inversement, pour faire échec à une tactique de méchant, faire parler le bon tout de suite.

     La phrase magique du Rien sans Rien : « Et vous que me proposez-vous en échange de ce que vous me demandez ? »

     L’accouchement sans douleur : suggérer à l’autre des arguments intellectuellement brillants pour qu’il les « découvrent » et les prennent à son compte.

     Bouledogue : Ne pas lâcher sur un argument même secondaire qui vous semble cacher une limite de pouvoir de négociation de l’autre. Ne lui rendez surtout pas le service de le laisser s’esquiver s’il a l’air de vouloir passer à autre chose.

     La pression/menace : A n’utiliser qu’en dernier recours et que si elle est vraiment crédible.

Quelques tactiques de contournement

     Le déplacement : changer de sujet discrètement pour abandonner une zone où l’on est inconfortable (si l’autre est adroit, il fera le bouledogue). Nécessite un peu de malhonnêteté intellectuelle. « Bon, notons de revenir sur ce point un peu plus tard, mais voyons cet autre aspect pour l’immédiat…. »

     L’évitement : comparable à détournement mais en changeant vers un sujet anodin (pluie et beau temps). Tactique très puissante face à la tentative de mettre en colère, face au vidage de sac, face au procès d’intention ou face aux arguments déloyaux et aux maximalistes. Inversement, face à une tentative d’évitement, jouer le bouledogue (« il semble que vous soyez en difficulté sur ce point puisque vous évitez de me répondre. Mais je veux en avoir le coeur net »). Nécessite d’être un peu méchant et pas trop poli.

     L’édredon : refuser une discussion par des réponses faites d’indifférence. Face à une idée « C’est vous qui le dites », « C’est votre idée » ; face à une opinion « c’est possible » ; face à un sentiment « c’est votre problème », « c’est une considération personnelle ». etc.

     Le disque rayé : Opposer inlassablement le même argument. Présente un risque de rupture mais permet d’enchaîner finalement vers un évitement « puisque nous ne pouvons avancer sur ce point, passons pour le moment à une autre question ».

     Le sphinx ; demeurer silencieux et imperturbable. Peut désarçonner un vendeur mais peut énerver.

La conclusion :

     Si tout n’est pas réglé, savoir remettre à plus tard ce qui reste à négocier.    

     Si l’accord est positif pour soi, se garder de tout triomphalisme. Attention au baroud d’honneur des autres.

     Attention à la baisse de pression. L’autre profitera de la moindre résistance du moment. Inversement, ne pas trop insister à ce moment pour ne pas risquer d’énerver l’autre (il est peut être en train de regretter une concession et risque de tout remettre en question)

     Ecrivez (les mots prononcés n’ont aucune valeur) ce qui a été convenu et si possible faites signer. Si c’est l’autre qui écrit, vérifiez lettre à lettre.

     Prenez congé sans attendre. Surtout pas de commentaires sur la négociation passée.

Quelques leviers de persuasion à identifier (L. Bellenger) :

  1. L’effet de compétence : énoncé de références, statistiques[3], témoignages. Ne pas en abuser.  Ne supporte pas bluff, excès ou erreur. Ajuster à un interlocuteur sur lequel prendre l’ascendant est possible.
  1. L’effet de méthode : classer, ordonner. « Je vois trois cas de refus », etc. Cela présente l’avantage de « fermer la discussion » et limiter les possibles quand cela nous arrange.
  1. L’effet démonstratif : approche de logique avec des « vu que… » , donc , en conséquence, etc.  Adapté en culture cartésienne. Inadapté en contexte houleux.
  1. L’effet solutionneur : Solution pragmatique, inattendue. Déroute les esprits critiques ou perfectionnistes. N’a pas à être justifiée à l’excès, juste à être décrite dans ses modalités. 
  1. L’effet d’insistance et de répétition. Cet effet est très puissant pour imposer, faire mémoriser, clarifier, juguler la contradiction, etc. Mieux si c’est reformulé de façon variée.
  1. L’effet d’implication.   Mettre l’autre en situation de « Vous avez bien constaté vous-même que … » A utiliser avec précaution pour éviter une ruade.
  1. Effet de connivence. Lier l’autre sur des points d’accords pour les contredire plus tard. « Nous sommes bien d’accord sur ce point, … ».
  1. L’effet d’exemplarité. Faire valoir son comportement comme preuve de ce qu’il faire ou penser.  Peut aliéner l’autre dans un modèle unique.
  1. L’effet de doute. Question déstabilisante « D’où tenez vous que ?… », « quel est le vrai problème derrière ?… ». Idéal pour contre carrer une tentative de prise d’ascendance.
  1. L’effet de principe et d’évidence. Mise en avant, non démontrée, d’une certitude. « Tout le monde sait que… » ex. utilisation de dicton : « rien ne remplace d’expéricence… », « cette solution n’a jamais fonctionné nulle part.»
  1. L’effet d’intimidation. Menace du pire ou dramatisation. « Si vous n’acceptez pas cet argument, autant clore le débat ». Jouable en rapport de force désiquilibré.
  1. L’effet dialectitien. Trouver une faille ou une incohérence chez l’autre. « Comment pouvez-vous à la fois dire ceci et cela ?… ». exige écoute, intelligence et répartie. Agressif car disqualifie l’autre.
  1. L’effet porte parole. « La tradition française nous impose de soutenir que… », « la vente exige des hommes qui … »
  1. L’effet de bonne foi. « Pourquoi voudriez-vous que ?… » avec un soupir de martyr,
  1. L’effet émotionnel. Jouer sur la sensibilité, les nerfs, les sentiments. Du pathétique. Créer un dérangement,
  1. L’effet de bonne volonté. Faire le grand seigneur en accordant une concession. Admettre pour mieux imposer plus tard. « Admettons que… mais ensuite dans ce cas là … »

[1] Important : Le possible est souvent plus étendu que l’on croit et par manque de confiance et de pugnacité, on se fixe des objectifs en retrait car on se dit « jamais ils n’accepteront! »

[2]  Concrètement, laisser un petite marge sur ses notes pour préciser d’un signe ou d’une lettre la nature de chaque propos.

[3] Qui, comme les bikinis peuvent tout montrer sauf l’essentiel.

En résumé,
pour négocier, il faut savoir prendre des gants…

Mais surtout du temps et des conseils

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